Le Sénat préconise une carte « famille monoparentale » pour lutter contre l’isolement et la stigmatisation des parents solo

Un rapport du Sénat recommande l’expérimentation d’une carte de « famille monoparentale », ouvrant à des avantages voire des tarifs préférentiels pour mieux soutenir et accompagner les parents « solo ».

Aujourd’hui, en France, une famille sur quatre est une famille monoparentale, avec une femme à sa tête dans 82 % des cas.
SolStock / Getty Images Aujourd’hui, en France, une famille sur quatre est une famille monoparentale, avec une femme à sa tête dans 82 % des cas.

FAMILLE - « La reconnaissance de la place des familles monoparentales dans notre société pourrait se traduire par la création d’une carte de “familles monoparentales” ». C’est l’une des dix recommandations formulées par la délégation aux droits des femmes du Sénat pour reconnaître ces familles comme un modèle familial parmi d’autres et lutter contre leur précarisation.

Dans un rapport publié ce jeudi 28 mars, les sénatrices Colombe Brossel (groupe socialiste, écologiste et républicain) et Béatrice Gosselin (apparentée Les Républicains) proposent que ce dispositif soit testé à titre expérimental pendant 6 mois, avec une évaluation et un bilan à la clef.

L’idée, c’est de créer une carte « un peu à l’image de la “carte famille nombreuse” », a exposé Colombe Brossel lors d’une conférence de presse dédiée à la présentation du rapport. « C’est une carte reconnaissant le statut de famille monoparentale, qui serait une carte qu’on aurait le droit de demander ou non (...) et qui permettrait par exemple d’avoir un certain nombre de droits ou de prestations attachées », a-t-elle détaillé.

Par exemple, un accès ou des tarifs privilégiés à la cantine scolaire, aux transports publics et collectifs, aux loisirs, aux colonies de vacances, aux activités périscolaires, aux activités sportives et culturelles, aux modes de garde, au logement social ou à une mutuelle.

Doublement des congés « enfant malade »

Mais cette carte pourrait répondre aussi à certaines demandes formulées auprès des parlementaires de la part des entreprises. « On a rencontré des entreprises qui nous ont dit qu’elles voulaient, dans le cadre de leur politique RSE, proposer des politiques spécifiques aux familles monoparentales », a développé Colombe Brossel, qui donne comme exemple le doublement du nombre de jours de congés « enfant malade ».

« Quand on est à deux, on a deux fois trois jours, et quand on est tout seul, on n’a que trois jours, souligne-t-elle. Certaines entreprises aimeraient travailler sur le doublement de ces jours et sur la flexibilité des horaires pour les parents solos, et nous ont dit qu’il leur manquait un cadre protecteur pour organiser ça dans leurs entreprises. » Cette carte pourrait donc répondre aussi à ce besoin des employeurs, publics comme privés.

Aujourd’hui, en France, une famille sur quatre est une famille monoparentale, avec une femme à sa tête dans 82 % des cas. Selon l’Insee, la pauvreté touche 45 % des enfants qui vivent seuls avec leur mère. « Les familles monoparentales, et tout particulièrement les mères isolées, sont exposées à un cumul sous-estimé d’inégalités et de difficultés : inégalités de genre, niveau de vie inférieur, privations matérielles et sociales, difficultés d’emploi, de logement, de mode de garde, etc. », rappellent les parlementaires.

La ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, avait récemment soutenu l’idée d’une telle « carte » pour améliorer la « reconnaissance plus spécifique que l’on doit aux familles monoparentales ».

« Stigmatisation et isolement »

Les sénatrices insistent aussi sur la fragilité économique de ces familles : « Quinze pour cent des familles monoparentales qui seraient éligibles, ne bénéficient ni du RSA, ni de l’allocation de soutien familial (187,24 euros par mois et par enfant, versés en cas de défaillance de l’autre parent »), pointe le rapport, qui recommande des campagnes de communication sur l’accès aux droits. « Les deux mots qui sont revenus le plus lors des auditions sont les mots “stigmatisation” et “isolement” », rappelle Béatrice Gosselin.

La mission s’attaque également à la question des pensions alimentaires « qui ne sont pas payées dans près d’un tiers des cas ». Elle préconise des « objectifs plus ambitieux de réduction des taux d’impayés » et envisage la piste d’un « prélèvement à la source si ces objectifs ne sont pas atteints ». Les sénatrices recommandent également d’expérimenter « le maintien provisoire du versement de l’allocation de soutien familial (ASF) en cas de remise en couple du parent gardien », mesure réclamée par les associations de mères solos.

Depuis début mars, deux parlementaires planchent aussi sur la question des familles monoparentales, mandatés par Matignon. Sur le même sujet, le député socialiste Philippe Brun a lancé en octobre un groupe transpartisan à l’Assemblée nationale afin d’aboutir à une proposition de loi au premier semestre.

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